Le décret BACS rend obligatoire l’installation d’une GTB pour tous les bâtiments tertiaires – neuf et existants – qui comportent une installation de chauffage et/ou de climatisation d’une puissance nominale supérieure à 70 kW.
Au plus tard le 1er janvier 2027, tous les bâtiments tertiaires, dont la puissance de chauffage ou de climatisation dépasse 70 kW, devront être équipés d’une GTB.
Initialement, le Décret n°2020-887 du 20 Juillet 2020, paru au JORF du 21 juillet (NOR: TRER2014562D), relatif au système d’automatisation et de contrôle des bâtiments non-résidentiels et à la régulation automatique de chaleur, dit Décret BACS pour Building Automation & Control Systems, avait pour but de transposer les articles 8, 14 et 15 de la directive 2010/31/UE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 2010 sur la performance énergétique des bâtiments requérant la mise en œuvre de systèmes d’automatisation et de contrôle des bâtiments non résidentiels, et de systèmes de régulation automatique de chaleur.
Il avait fallu 10 ans pour transposer la Directive Européenne, mais pas tout à fait trois ans ont suffi pour que le Décret BACS soit nettement sévérisé. Il concernait en 2020 les bâtiments tertiaires – bureaux, hôtels, centres commerciaux … -, neufs et existants, équipés d’un système de chauffage ou de climatisation, combiné ou non à un système de ventilation, d’une puissance nominale supérieure à 290 kW.
Le Décret n° 2023-259 du 7 avril 2023 relatif aux systèmes d’automatisation et de contrôle des bâtiments tertiaires (NOR : TREL2232678D) et l’Arrêté du 7 avril 2023 relatif aux systèmes d’automatisation et de contrôle des bâtiments tertiaires (NOR : TREL2232681A) ont abaissé ce plafond à 70 kW. Ce qui change tout. Avec un plafond à 290 kW, on parlait sans doute de dizaines de milliers de bâtiments concernés. Avec l’abaissement du plafond à 70 kW, virtuellement tout le parc tertiaire existant est concerné, sauf les plus petits locaux, ainsi que toute la construction neuve en tertiaire.
Quels sont les bâtiments concernés ?
La nouvelle rédaction du Code de la Construction et de l’Habitation résultant du Décret et de l’Arrêté du 7 avril 2023, se trouve dans la Partie Réglementaire https://www.legifrance.gouv.fr/codes/texte_lc/LEGITEXT000006074096, Livre 2er, Titre VII, Chapitre V : Systèmes Techniques des bâtiments (Art. R175-1 à R175-6). Le 10 avril 2023, week-end de Pâques aidant certainement, le code n’était pas encore mis à jour.
Le texte initial prévoyait « sont munis d’un système d’automatisation et de contrôle, les bâtiments dans lesquels sont exercées des activités tertiaires marchandes ou non marchandes, y compris ceux appartenant à des personnes morales du secteur primaire ou secondaire, équipés d’un système de chauffage ou d’un système de climatisation, combiné ou non avec un système de ventilation, dont la puissance nominale utile est supérieure à 290 kW. Sont assujettis à ces obligations le ou les propriétaires des systèmes de chauffage ou de climatisation des bâtiments ».
« Activité tertiaire non-marchande » englobe notamment l’enseignement : la plupart des écoles et écoles maternelles, tous les collèges, tous les lycées, toutes les universités et grandes écoles dépassent 70 kW de puissance de chauffage et sont donc soumis au Décret BACS.
La nouvelle rédaction explique que l’objectif poursuivi est d’équiper tous les bâtiments tertiaires existants et neufs de systèmes d’automatisation et de contrôle d’ici le 1er janvier 2025 pour ceux possédant des systèmes de plus de 290 kW et d’ici le 1er janvier 2027 pour ceux équipés de système de plus de 70 kW. Une distinction est faite entre les bâtiments neufs et existants, ce qui revient à introduire trois nouveaux cas :
1 – En ce qui concerne la construction neuve, la nouvelle rédaction code indique « Aux bâtiments équipés d’un système de chauffage ou d’un système de climatisation, combiné ou non avec un système de ventilation, dont la puissance nominale utile est supérieure à 70 kW et dont le permis de construire est déposé un an après la publication du décret n° 2023-259 du 7 avril 2023, sauf si leur propriétaire produit une étude établissant que l’installation d’un système d’automatisation et de contrôle n’est pas réalisable avec un temps de retour sur investissement inférieur à dix ans. Dans ces bâtiments, l’ensemble des systèmes techniques mentionnés au 4° de l’article R. 175-1 sont reliés au système d’automatisation et de contrôle. »
2 – « Aux autres bâtiments équipés d’un système de chauffage ou d’un système de climatisation, combiné ou non avec un système de ventilation, dont la puissance nominale utile est supérieure à 70 kW, lorsque leur système de chauffage ou de système de climatisation, combiné ou non avec un système de ventilation fait l’objet d’un renouvellement
3 – et au plus tard le 1er janvier 2027, sauf si leur propriétaire produit une étude établissant que l’installation d’un système d’automatisation et de contrôle n’est pas réalisable avec un temps de retour sur investissement inférieur à dix ans. Dans ces bâtiments, sont reliés au système d’automatisation et de contrôle le ou les systèmes de chauffage ou de climatisation, combinés ou non avec un système de ventilation, dont la puissance nominale utile est supérieure à 70 kW, ainsi que les systèmes techniques mentionnés au 4° de l’article R. 175-1 avec lesquels la connexion est réalisable avec un temps de retour sur investissement inférieur à dix ans, déduction faite des aides financières publiques. »
Ce qui, en résumé, donne les consignes suivantes :
– pour tous les bâtiments tertiaires existants et neufs possédant des systèmes de plus de 290 kW, d’ici le 1er janvier 2025,
– en ce qui concerne les bâtiments tertiaires possédant des systèmes de chauffage ou de climatisation de plus de 70 kW, pour les bâtiments neufs dont le permis de construire est déposé à compter du 8 avril 2024, pour les bâtiments existants, dès que l’on rénove leurs systèmes de chauffage ou de climatisation, et, en tout état de cause, avant le 1er Janvier 2027.
Par conséquent, tous les bâtiments tertiaires devront être équipés avant le 1er janvier 2027. C’est dans moins de 4 ans, il n’y a pas de temps à perdre. Le retour sur investissement est porté de 6 à 10 ans. Mais de toutes manières, en ces temps d’inflation des coûts de l’énergie, ce ne devrait pas être un obstacle à l’application du décret BACS.
Quels sont les systèmes techniques concernés par le Décret BACS ?
Le Décret BACS utilise la puissance du chauffage ou de la climatisation pour définir les bâtiments concernés. Dans le détail, en ce qui concerne le chauffage, tous les systèmes concevables doivent être pris en compte : toutes les chaudières à tous les combustibles, et même les chaudières électriques, le chauffage électrique direct par effet Joule (convecteurs, radiateurs, plancher et plafond chauffant), ainsi que les générateurs d’air chaud électriques. Les pompes à chaleur, quelle que soit leurs technologies, les sous-stations de raccordement à un réseau de chaleur urbain, ainsi que toutes les solutions de récupération de chaleur sur des énergies fatales sont également prises en compte.
En ce qui concerne la climatisation, le Décret BACS énumère toutes les technologies et jusqu’au raccordement à un réseau de froid urbain.
Le Décret BACS demande également une interopérabilité entre les différents systèmes techniques pour leur pilotage et contrôle. Ce sera compliqué pour les solutions de climatisation à détente directe dont les protocoles de communication sont fermés et différents selon les marques. Doc. Schneider Electric
Le règne des passerelles – un automate capable de traduire un protocole de communication dans un autre – arrive. Pour satisfaire les exigences du décret BACS, il faudra ramener sous une unique supervision les différents systèmes techniques qui, dans les bâtiments existants, parlent souvent des langages différents.
Tout ça, c’est juste pour déterminer si le bâtiment est concerné ou pas. Dans la suite, le Décret BACS demande que les systèmes techniques du bâtiment soient suivis et il cite en particulier : chauffage, la climatisation, la ventilation, la production d’eau chaude, l’éclairage, le système d’automatisation et de contrôle, la production d’électricité sur site, les systèmes combinant plusieurs de ces systèmes.
Le Décret BACS, nouvelle mouture, ne mentionne pas les ascenseurs, les escaliers mécaniques, le contrôle d’accès, la réfrigération, les groupes électrogènes de secours, les cuisines professionnelles, … soit autant de systèmes techniques qui échappent aux obligations du Décret, mais qu’il serait parfaitement logique d’inclure aussi dans son périmètre dans la mesure où ils consomment de l’énergie.
Quelles sont les exigences du Décret BACS rafraîchi le 7 avril 2023 ?
Le Décret BACS demande la mise en œuvre de systèmes d’automation et de contrôle capables de :
– suivre, enregistrer et analyser en continu, par zone fonctionnelle et à un pas de temps horaire, les données de production et de consommation énergétique des systèmes techniques du bâtiment et ajustent les systèmes techniques en conséquence. Ces données sont conservées à l’échelle mensuelle pendant cinq ans ;
– situer l’efficacité énergétique du bâtiment par rapport à des valeurs de référence, correspondant aux données d’études énergétiques ou caractéristiques de chacun des systèmes techniques ; ils détectent les pertes d’efficacité des systèmes techniques et informent l’exploitant du bâtiment des possibilités d’amélioration de l’efficacité énergétique ;
– d’être interopérables avec les différents systèmes techniques du bâtiment ;
– permettre un arrêt manuel et la gestion autonome d’un ou plusieurs systèmes techniques du bâtiment.
Les exigences n’ont pas varié par rapport à la version 2020, elles sont simplement étendues aux bâtiments dont la puissance de chauffage ou de climatisation est supérieure à 70 kW.
Ces exigences, notamment l’archivage des données durant 5 ans, l’ajustement automatique des systèmes techniques, la détection de perte d’efficacité et l’alerte des exploitants, … correspondent à ce que savent faire des GTB installées dans de grands bâtiments de bureaux. Rien de tel n’a jamais été mis en œuvre dans un bâtiment dont la puissance de chauffage dépasse jusque 70 kW, une école maternelle existante de 4 ou 5 classes, par exemple.
Une révolution culturelle
Ces exigences impliquent aussi qu’un vrai exploitant, capable de comprendre les informations transmises par le « système d’automation et de contrôle » du bâtiment, puis capable d’agir en conséquence, suive le bâtiment quotidiennement. Dans son rapport « Bâtiments équipés de systèmes de pilotage – 12 enseignements à connaître » https://qualiteconstruction.com/publication/batiments-equipes-de-systemes-de-pilotage-12-enseignements-a-connaitre/, l’Agence Qualité Construction (AQC) pointe notamment :
– Le fait que l’existence sur site d’un référent bien formé est indispensable pour que le système soit, d’une part, utilisé, d’autre part, utilisé correctement.
– Combien la prise en compte des besoins du client – notamment sa compétence en matière de pilotage du bâtiment – et clarté de l’interface de contrôle comptent beaucoup.
– A quel point la bonne conception d’un système de GTB indispensable à son bon fonctionnement.
L’AQC pointe aussi la nécessité de prévoir un accès facile aux organes de pilotage du bâtiment (compteurs, vannes de régulation, etc.). doc. PP
Bref, il n’est pas certain que le marché français dispose de systèmes techniques capables de satisfaire les exigences du Décret BACS à des coûts accessibles aux petits bâtiments. Il est en revanche tout à fait sûr qu’il n’existe pas suffisamment d’opérateurs formés à l’utilisation d’une GTB pour généraliser leur déploiement dans des centaines des milliers de bâtiments d’ici au 1er janvier 2017.
Nous allons regarder de plus près l’offre technique adaptée aux exigences du Décret BACS et nous vous présenterons nos trouvailles dans un prochain article.