Au salon Artibat 2023 à Rennes, Lemasson, Nibe, Airwell, Geothermik, Viessmann, … proposaient des pompes à chaleur géothermiques. En Février 2023, le gouvernement lançait « un plan d’action pour accélérer » et nous savons qu’une partie des besoins de chaleur et de rafraîchissement du Palais de l’Elysée est couverte par la géothermie. François Bayrou, Haut-commissaire au Plan, aime bien la géothermie.
Mais, globalement, où en est la géothermique en France ?
C’est surtout la Géothermie de Moyenne Importance (GMI) qui nous intéresse. C’est de très loin la plus utilisée en bâtiment. En association avec des pompes à chaleurs géothermiques, elle chauffe, produit de l’eau chaude sanitaire et rafraîchit. Elle peut être associée à du solaire thermique et à du solaire photovoltaïque pour atteindre des rendements très importants. Doc. PP
Début octobre 2023, l’AFPG – Association Française des Professionnels de la Géothermie – a publié son étude de filière 2023. C’est l’occasion de faire le point sur la géothermie. En commençant par préciser de quoi on parle. L’AFPG le rappelle, il existe trois types de géothermie, dont les possibilités, les coûts et les réglementations liées sont très différentes :
– la géothermie très profonde et très haute température qui produit de la vapeur d’eau que l’on peut utiliser directement pour produire de l’électricité ou pour couvrir les besoins de chaleur de process dans l’industrie,
– la géothermie profonde, comprise en 200 et 2000 m, remonte de la chaleur comprise entre 30 et 100°C, utilisable en chauffage, en industrie, en agriculture, pour l’alimentation des réseaux de chauffage urbain, des centres de loisirs aquatiques, etc.
– la géothermie de surface, dite aussi Géothermie de Minime Importance (GMI), associée à des forages d’une profondeur maximale de 200 m et qui remonte une température de 10 à 30°C.
Voici les différents types de géothermies selon le BRGM. Doc. BRGM
La géothermie de Minime Importance, dite aussi géothermie de surface, chauffe, produit de l’eau chaude sanitaire et rafraîchit. Doc. AFPG
Les deux sortes de GMI
La GMI recouvre deux technologies différentes : la boucle ouverte et la boucle fermée. Dans les deux cas le forage doit avoir une profondeur de 200 m au maximum et la puissance prélevée doit demeurer inférieure à 500 kW. Attention, il s’agit de la puissance prélevée, pas de la puissance qui sera restituée par l’installation de chauffage, en aval d’une pompe à chaleur.
La GMI à boucle ouverte consiste à puiser et à rejeter de l’eau dans une nappe phréatique, au moins deux forages sont donc nécessaires.
Outre les deux contraintes communes aux deux GMI – ≤ 200 m de profondeur de forage et ≤ 500 kW de puissance prélevée -, la GMI sur boucle ouverte exige en outre que la température de l’eau prélevée soit inférieure à 25°C, le débit total des pompes dans l’aquifère soient inférieurs à 80 m3/h, les eaux prélevées doivent être réinjectées dans le même aquifère, la différence entre les volumes prélevés et les volumes réinjectés est nulle, la variation de température dans la nappe dans un rayon de 200 m autour du rejet doit être inférieure à 4°K. doc. AFPG
La réglementation simplifiée pour la GMI
La seconde catégorie de GMI avec une boucle fermée enterrée consiste à faire circuler de l’eau glycolée dans une ou plusieurs boucles enfouies verticalement ou disposées horizontalement à faible profondeur. Doc. AFPG
Selon la réglementation, les ouvrages dont la profondeur est comprise entre 10 et 200 m n’ont pas besoin d’autorisation préalable. Il suffit de les déclarer sur le « Téléservice de la géothermie de minime importance », dont le site www.geothermie.developpement-durable.gouv.fr est géré par le Ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires. Une fois la déclaration effectuée, le site délivre une preuve de dépôt de la déclaration. Ce qui est réputé valoir accomplissement de diverses procédures, notamment celle prévue par l’article L.411-1 du code minier : « Toute personne exécutant un sondage, un ouvrage souterrain, un travail de fouille, quel qu’en soit l’objet, dont la profondeur dépasse dix mètres au-dessous de la surface du sol, doit déposer une déclaration préalable auprès de l’autorité administrative compétente ».
Les travaux de forage pour des boucles verticales ouvertes ou fermées, doivent être réalisés par des entreprises qualifiées RGE Forage nappe ou RGE Forage sonde. La liste des entreprises détenant ces qualifications se trouve sur le site https://www.qualit-enr.org/qualifications/qualiforage/ géré par l’association QualitEnR.
Le régime administration simplifié appliqué à la GMI est cependant limité. Le BRGM (Bureau des Recherches Géologiques et Minières) divise en effet la France en trois types de zones, vertes, oranges et rouges :
– dans les zones vertes, le régime simplifié s’applique directement,
– dans les zones oranges, un « Expert GMI » doit vérifier et attester du caractère sans risque du projet de GMI,
– dans les zones rouges, le régime simplifié ne s’applique plus et on revient à la procédure d’autorisation préalable, plus longue et plus coûteuse.
Tous ces points sont résumés sur une infographie disponible ne ligne https://www.geothermies.fr/sites/default/files/inline-files/gmi_v2_interactif.pdf. De son côté, le BRGM propose une page d’aide https://assistance.brgm.fr/aide/GMI portant sur les diverses déclarations administratives.
Enfin, l’Ademe propose un guide « Réussir un projet de qualité en géothermie de surface » https://multimedia.ademe.fr/telechargements/Extrait-R%C3%A9ussir-un-projet-g%C3%A9othermie-surface-010767.pdf .
Les récentes innovations en GMI
La synthèse de l’AFPG rapporte plusieurs innovations apparues depuis quelques années en GMI.
La première de ces innovations, les sondes inclinées, sert à économiser de la place en surface. Développée en France par Celsius Energy https://www.celsiusenergy.com/, cette approche réduit considérablement l’espace nécessaire en surface, ce qui permet de développer la géothermie en zone urbaine dense en construction neuve et en réhabilitation. Comme pour les champs de sondes verticales, l’échangeur est relié à une pompe à chaleur, qui peut fournir à la fois du chaud et du froid. Un système de pilotage numérique utilise les données des capteurs installés dans les différentes composantes du système pour la gestion de la performance.
Un démonstrateur de la technologie de Celsius Energy est opérationnel depuis 2020 à Clamart (92) et plusieurs installations commerciales ont été réalisées (en Bretagne, Bourgogne-Franche-Comté, Auvergne-Rhône-Alpes et Île-de-France). Doc. Celsius Energy
La seconde innovation est le couplage de la géothermie et du solaire thermique. Cette solution débouche soit sur SETIS-HT pour Stockage d’Energie Inter-Saisonnier Souterrain Haute Température, soit sur l’offre de solaire géothermique de CaleôTerre https://www.plancher-chauffant-caleosol.fr/sous-famille/solaire-geothermique.
Côté SETIS-HT, l’AFPG met en avant AB solar https://www.ab-solar.fr/, une start-up productrice de chaleur et de froid renouvelables et peu carbonés. Elle a développé le premier stockage d’énergie souterrain à haute température en France en septembre 2022. Doc AB Solar
Cette « Centrale Solaire sur Stockage d’Energie Souterrain (C2SES) », alimente via un réseau de chaleur urbain un écoquartier de 67 logements à Cadaujac en Gironde, pour ses besoins de chauffage et d’eau chaude sanitaire. Ce SETIS-HT est composé de 60 sondes géothermiques verticales de 32 mètres de profondeur. Elles permettent de stocker la chaleur produite par les capteurs solaires thermiques (eau à environ 85°C) disposés à proximité sur une surface de 950 m². Ce projet a été lauréat des Trophées de la géothermie en 2022.
Troisième innovation, celle d’Accenta qui a développé un système de pilotage en temps réel des installations – capteurs, émetteurs de chaleur ou de froid, panneaux solaires, etc. -, en fonction d’informations sur la température extérieure et intérieure du bâtiment, l’ensoleillement, la vitesse du vent pour dimensionner au plus juste le nombre et la profondeur des sondes géothermiques et d’optimiser leur utilisation.
Beaucoup reste à faire
Au total, en 2022, seulement 3500 nouvelles installations géothermiques ont été réalisées, dont 94% en maisons individuelles, 1% en collectif et 5% en tertiaire et seulement 12 installations en industrie. Le stock des systèmes géothermiques en France atteint environ 205 300 installations, dont 98% en maisons individuelles, 1% en tertiaire et 1% en industrie.
Le Plan d’action gouvernemental du 2 février 2023 évoque l’objectif de doubler le nombre d’installations de pompes à chaleur géothermiques chez les particuliers d’ici 2025.
Le Fonds Chaleur, géré par l’Ademe peut y contribuer.
Dans de prochains articles, nous approfondirons les technologies et les offres de GMI d’abord destinées à la maison individuelle, plus celles que l’on peut appliquer au collectif et au tertiaire, ainsi que les diverses aides financières mobilisables.