Intermat est revenu en 2024 après six ans d’absence

Pascal Poggi pour batimédia

Intermat s’est tenu à Villepinte du 24 au 27 avril 2024. Le salon accueilli 1065 exposants, 127 500 visiteurs professionnels, dont 21% de visiteurs internationaux venant de 130 pays différents. Le grand thème de cette édition était la décarbonation, c’est-à-dire le remplacement des moteurs diesel par de la traction électrique, de l’hydrogène sous forme de moteur à combustion ou de pile à combustible produisant de l’électricité pour entraîner un moteur électrique, et des carburants d’origine biologique comme le HVO (Hydrotreated Vegetable Oil).

Le salon Intermat se tient traditionnellement tous les trois ans, mais, Covid aidant, il n’avait pas eu lieu depuis 2018. En parcourant les allées, les motorisations diesel étaient bien présentées, mais presque en s’excusant. L’idée principale de l’édition 2024 du salon était que les jours du diesel sont comptés et qu’il sera bientôt remplacé par l’hydrogène et/ou le moteur électrique. Le diesel sera sûrement présent pendant des dizaines d’années encore, mais son remplacement sur le marché européen est activement étudié, voire en cours. Deux approches différentes sont nécessaires. La première porte sur la transformation d’engins diesel en engins électriques. La seconde porte sur la conception de nouveaux engins électriques.

Tansformer des engins thermiques en engins électriques

Deux approches de la transformation de thermique en électriques étaient exposées à Intermat. Pour commencer, le Cetim (cetim.fr) a exposé son démonstrateur de transformation d’une mini-pelle sur chenilles classique en mini-pelle 100% électrique. Le Cetim développe en effet des méthodes rationnelles pour transformer des engins thermiques en engins électriques dans le cadre de ses Projets Stratégiques Sectoriels (PSS), d’accompagnement du monde de la mécanique. Le Cetim a en particulier développé une méthode à travers le PSS Electrification des Engins Mobiles. Le point clef, selon le Cetim, consiste à optimiser le couple moteur électrique/variateur de fréquence. Au cours de ses travaux, le Cetim s’est aussi rendu compte que la réduction du bruit entraînée par la disparition du moteur thermique – un peu comme la marée fait émerger des rochers masqués quand elle descend – fait apparaître d’autres bruits : transmissions hydraulliques, … qu’il faut traiter. L’architecture technique retenue par le Cetim se compose d’un motoréducteur électrique pour la rotation de la tourelle, d’un groupe motopompe pour l’ensemble des vérins hydrauliques de la mini-pelle et d’un motoréducteur dans chacune des deux chenilles. Il a fallu que le Cetim développe un collecteur électrohydraulique tournant spécifique, pour faire transiter des courants électriques très importants depuis la tourelle qui tourne, vers les chenilles. Fort de cette expérience, le Cetim se propose d’accompagner les industriels et les entreprises dans la transformation de leurs engins, du diesel vers l’électrique.

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A l’issue de sa transformation, la mini-pelle du Cetim est 100% électrique, avec la même puissance que le modèle original et une autonomie de 4 heures. Le Cetim a travaillé avec une contrainte forte, mais qui est la règle dans le cas d’une transformation diesel vers l’électrique : le châssis n’a pas été modifié. Il était conçu pour accueillir un moteur diesel et non des batteries électriques. Il a fallu optimiser l’emplacement des batteries et des moteurs électriques, ainsi que la répartition des masses, sans augmenter le tonnage de l’engin. Doc. Cetim

Standardiser l’électrification

L’entreprise américaine ZQuip, membre du groupe Moog Construction, exposait une autre idée de l’électrification à Intermat. ZQuip propose une approche modulaire pour convertir des engins diesel existants en engins à traction électrique. La solution repose sur trois composants :

– Des batteries modulaires de 70 ou 140 kWh, interchangeables sur toutes les machines,

– un kit de conversion comportant une corbeille de fixation des batteries, un moteur électrique et de l’électronique (soft et hardware) pour gérer la température du circuit électrique,

– une connectivité IoT pour géolocaliser les engins équipés, suivre leur consommation d’électricité et le niveau utile restant dans leurs batteries.

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Le caractère modulaire et interchangeable des batteries ZQuip est la clef du système. Deux tailles de batteries seulement, que l’on peut monter en parallèle pour atteindre l’autonomie souhaitée et qui sont interchangeables à travers tous les modèles de machines converties. Doc. ZQuip

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ZQuip a démontré l’intérêt de sa solution en équipant une mini-pelle CAT 308, créant une version 100% électrique de ce classique des mini-pelles de 8 tonnes. Dco ZQUip

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Imaginons un chantier avec six engins, dont deux requièrent des capacités de 800 kWh et 4 se contentent de 400 kWh, soit un total de 3,2 MWh par jour. La solution ZQuip permet d’équiper chaque engin exactement de la capacité dont il a besoin. Tout en gérant 2 types de batteries standardisés qui l’on peut échanger d’un engin à l’autre. Doc. ZQuip

Pour une entreprise possédant plusieurs engins, ou mieux encore, pour un louer d’engin, la conversion d’un parc d’engins du diésel vers l’électrique se standardise avec la solution ZQuip. Un loueur peut même se charger de remplacer sur site les batteries vides par des batteries rechargées : les modules sont remplacés en quelques minutes.

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Komatsu Europe a présenté à Intermat 2024 sa mini-pelle tout électrique de 3,5 tonnes PC33E-6 dotée d’une batterie lithium-ion. Ci-dessous, la pelle électrique de 13 tonnes Komatsu PC138E-11, équipée d’une batterie lithium-ion, sera commercialisée en Europe d’ici la fin de l’année 2024. Doc Komatsu

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De nouveaux engins tout électriques

En ce qui concerne les nouveaux engins tout électriques, Putzmeister, le spécialiste des pompes à béton automotrices, présentait à Intermat son camion-toupie eMixer P9 GT IONTRON entièrement sur batterie. Le châssis a été fourni par le groupe SANY, propriétaire de Putzmeiter. Avec une capacité de batterie de 350 kWh, rechargée en une nuit sur une borne DC de 240 kW de puissance au maximum, le eMixer offre une autonomie de 150 à 160 km, suffisante pour une journée de travail en zone rurale ou urbaine, comportant jusqu’à 6 livraisons.

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Entièrement électrique, le eMixer offre un fonctionnement particulièrement silencieux, sans aucune émission de CO2 sur chantier ou durant le transport, un tambour de 9 m3 et un moteur électrique de 315 kW à couple élevé. Tout ça pour environ 350 000 € HT, soit environ 50% de plus qu’un camion-toupie diesel. Doc. PP

Putzmeister montrait aussi sa pompe à béton automotrice SANY SY25 Z4-150, compacte à quatre bras : 25 m de portée, un débit jusqu’à 137 m3/h et une pression de refoulement maximum de 66 bars. Plus puisant, le modèle SANY SY45 RZ5-160 atteint 44,1 m de portée, sur quatre essieux. Elle est associée à la nouvelle radiocommande HBC.

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Fournie par HBC-radiomatic, la radiocommande HBC permet à un opérateur de la pompe à béton SANY SY45 RZ5-160 de piloter son engin tout en se trouvant à quelques mètres de distance. Ce qui suffit pour éviter les décharges électriques dues au contact éventuel du bras de la pompe avec des ligne électriques. Doc. PP

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Hydrogène et traction électrique

De son côté, Liebherr n’a pas encore définitivement choisi une solution de traction décarbonée. Liebherr présentait à Intermat la L 507 E, sa première chargeuse sur pneus à batterie électrique. Le premier exemplaire a été remis à André LAFONT TP, une entreprise du sud-ouest. Liebherr pousse également les moteurs à HVO, comme alternative au diesel. Les HVO sont obtenus à partir d’huiles végétales hydrotraitées – traitées à l’hydrogène – et de graisses animales usagées. Ils dégagent jusqu’à 90 % d’émissions de CO2 en moins par rapport au gazole classique. Ils peuvent alimenter les moteurs diesel classiques, seuls ou comme partie d’un mélange. Ce qui permet au propriétaires d’engins de faire évoluer leur bilan CO2 sans investissements importants.

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Cette première Liebherr L 507 E livrée en France sera utilisée dans l’usine de traitement de déchets de l’entreprise André LAFONT TP et sera pour partie alimentée par les panneaux photovoltaïques installés sur le toit de ses hangars. De gauche à droite : Stephan Grammontin de LAFONT TP, Lilian Grassino de Liebherr Distribution et Services France, Romain Lescoute et David Lafont de LAFONT TP, Jan Liebherr en tant que Président du conseil d’administration de Liebherr-International AG et Sylvain Lefrançois von Liebherr Distribution et Services France. Doc. Liebherr

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Outre des engins tout électriques, Liebherr montrait à Intermat le moteur H964, un prototype de moteur à combustion à hydrogène de 9l avec 4 cylindres à injection directe. Avec ses faibles émissions, mais sa forte puissance, il devrait l’an prochain équiper plusieurs engins Liebherr. Le moteur H964 présente des interfaces thermiques et mécaniques comparables à celles d’un moteur diesel. Dès la phase de développement il génère presque zéro émission de CO2, le niveau des émissions de NOx est quant à lui sensiblement inférieur aux valeurs limites actuelles. Doc. PP

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Monnoyeur, distributeur exclusif de CAT en France, présentait le nouveau moteur C13D, 13 l de cylindrée, 515 kW de puissance (690 ch), compatible avec les carburants HVO, B20 (comportant 20% d’huile biologique) et B100 (100% d’huile de colza). Une version hydrogène est en développement. Doc. PP

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Pour les sites ne disposant pas d’une alimentation électrique suffisante, Liebherr a imaginé une batterie sur roue : le Liduro Power Port. Il stocke jusqu’à 160 kWh et offre une puissance d’alimentation maximale de 160 kW. Il peut recevoir un courant de charge jusqu’à D, compatibles HVOI32 A et fournir de la puissance sur plusieurs connexions utilisables en même temps : 16 A, 32 A, 63 A, 125 A. La surveillance de l’énergie et de l’état du système est assurée par l’unité de commande locale, mais aussi à distance via une application sur smartphone ou tablette. Doc. PP

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Monnoyeur distribue le groupe électrogène GEH2 développé par EODev, qui contient une pile à combustible PEM de Toyota et une batterie LiFePO4 (Lithium-Fer-Phosphate) de 44 kWh. Dans moins de 4 m² au sol, le groupe GEH2 offre une puissance électrique de 110 kVA (88 kW) en 50 ou 60 Hz et 400 V. Le GEH2® produit de l’électricité, de l’eau et de la chaleur, sans bruit et sans émissions de CO2 ni particules fines, à partir d’hydrogène stocké sous pression et de l’oxygène naturellement présent dans l’air. doc. PP

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Atlas Weyhausen commercialise désormais ses engins sous la marque Weucor et, pour l’instant, reste fidèle au diesel pour ses chargeuses sur pneus. Doc. Weycor

Pascal Poggi pour batimédia

Le coréen Develon, ex-Doosan Construction Equipment, montrait toute l’étendue de sa gamme à Intermat 2024 : depuis les mini-pelles DX17Z et DX19, dont la garantie est poussée jusqu’à 5 ans ou 3000 heures de fonctionnement, jusqu’aux chargeurs sur pneus DL420 avec une charge de basculement de plus de 18 tonnes. Doc. PP